MOOC biodiv

MOOC “BIODIVERSITÉ”

UN COURS SUR LA BIODIVERSITÉ, EN LIGNE, GRATUIT, ET AVEC POUR RÉFÉRENT SCIENTIFIQUE GILLES BOEUF, PRÉSIDENT DU MNHN ET PROFESSEUR AU COLLÈGE DE FRANCE.

Les MOOC (Massive Online Open Course) sont des formations en ligne ouverte à tous. Elles peuvent autant s’adresser aux débutants qu’aux professionnels. C’est le cas de ce MOOC biodiversité en ligne ici.

 

FUN MOOC : Biodiversité by fr-universite-numerique

Vertdéco utilise ce MOOC pour vérifier que ses compétences en biodiversité sont bien toujours au top… Test réussi (trois fois la note maximale) cette semaine et avec félicitations des pairs apprenants! Grand merci à nos correcteurs, cela fait plaisir!

Voici le premier devoir de Vertdéco. La question était :  Pourquoi observons-nous une érosion moins forte de la biodiversité en milieu marin qu’en milieu terrestre ?

NOTRE REPONSE :

Préambule : Le milieu marin représente la très grande partie du volume habitable de la planète: plus de 90%. Cette immensité, son accès difficile (que ce soit la pleine-mer et encore plus les profondeurs), la quasi-nullité de sa colonisation par l’homme sont des raisons qui expliquent à elles seules le déficit d’information concernant ce milieu. Ainsi, Gilles boeuf, directeur du museum national d’histoire naturelle, nous rappelle qu’il est “possible qu’on sous-estime la biodiversité marine” et par ricochet peut-être ainsi son érosion. Cette mise en garde scientifique est bien sûr nécessaire. Cependant, nous pouvons supposer qu’elle n’est pas rédhibitoire à notre étude: 250 000 espèces marines ont déjà été identifiées et nombre d’entre elles sont suivies en permanence par les scientifiques. C’est sur cette base de données connues et ses évolutions qu’est basé le constat de moindre érosion de la biodiversité.

Première partie : Nous pouvons relever au moins 3 raisons expliquant une érosion moins forte de la biodiversité en milieu marin qu’en milieu terrestre. 

  • La stabilité des océans : La masse océanique est pourvue d’une grande inertie. Il est bien sûr plus difficile pour un changement solaire, une météorite, un volcan voire une incidence humaine (ex:largage des déchets nucléaires en mer) de perturber significativement une telle masse, que ce soit chimiquement ou physiquement. Aussi, cette inertie semble s’accompagner d’une inertie biologique. Le milieu marin n’a pour l’instant que 250 000 espèces vivantes recensées (2 millions pour le bien plus petit milieu terrestre). Nombre d’entre elles font d’ailleurs partie de groupes n’ayant jamais réussi à évoluer hors de l’eau (19 groupes sur 31). Ce nombre d’espèces et cette évolution moindres réduit les impacts de ses espèces entre elles et sur leur immense contexte. Autrement dit, si sur terre nombre d’espèces sont capables de compétition pour changer leur milieu avec le risque d’en devenir dépendantes et disparaitre avec lui, ce risque-là est moindre en mer.
  • La connectivité des océans : Coupez une forêt en deux par une ligne TGV et vous obtiendrez deux petites forêts de moindre stabilité écologique. Ceci ne peut arriver en mer à cause de la connectivité. La mer est un volume dynamique se comportant en trois dimensions. L’exemple des juvéniles de soles, loups, dorades etc. visitant les lagunes littorales pour retourner en mer illustre bien ce qu’est la connectivité du milieu marin. Le plancton est en fait des populations souvent larvaires allant repeupler et recoloniser en permanence des zones lointaines en une immense dissémination. Les populations adultes, elle, peuvent s’affranchir de milliers de kilometres pour se reproduire (exemple des anguilles) ou pour se nourrir (exemple des thons). Cette connectivité des océans se retrouvent donc à tous les stades de la vie marine. D’ailleurs, cette compréhension nouvelle améliore désormais la philosophie des réserves marines dont la qualité repose non seulement sur la quantité d’aire protégées mais aussi désormais sur le réseau qu’elles forment entre elles.
  • Le manque d’endémisme des océans : Cette raison-là découle directement des raisons précédentes. Cependant, il m’a semblé intéressant de la mettre aussi en exergue. En effet, l’endémisme est un phénomène assez spécifiquement terrestre. Les espèces terrestres se retrouvent parfois à évoluer dans des milieux si singuliers qu’elles en deviennent endémiques: Elles ne se retrouvent nulle part ailleurs sur la planète. Cela est très fréquent sur les îles, qu’elles soient petites (celles des Galapagos sont un exemple très connues) voire immense (la Nouvelle-Zélande, l’Australie). Mais cela concerne aussi les montagnes, de simple lac ou des rivières, de simple prairies voire même le métro de Londres. L’exemple de la dernière spéciation connue nous y a été fourni avec cette population de moustique ayant tant évolué en un siècle qu’elle ne peut plus se mêler aux espèces de moustique extérieures! Ces espèces endémiques sont ainsi extrêmement fragiles face aux perturbations actuelles de l’environnement. Elles sont les premières à disparaitre : Durant les dernières 50 années, on recense 514 disparitions d’espèces terrestres, souvent endémiques, mais aucune marine.

***

Ce constat actuel positif de la biodiversité marine est à relativiser. Il n’est qu’une photographie instantanée ne prenant pas le même sens en cas de grande crise de la biodiversité. En prenant du recul, on voit déjà que sur les 500 dernières années, on recense la disparition de 15 espèces marines. En reculant cette fois à l’échelle géologique, on voit aussi que la crise du permien-trias (252 millions d’années) a connu une disparition de 95% de la biodiversité marine pour 75% “seulement” de celle terrestre. La stabilité des océans n’est donc pas un rempart total contre les grandes crises de la biodiversité. Qu’en est-il actuellement?

***

Deuxième partie : Si la crise de la biodiversité passe d’humaine à géologique, la biodiversité océanique chutera aussi. J’ai relevé 3 avertissements émis par nos professeurs : 

  • Les populations sont fragiles en terre comme en mer. Les populations marines ont été extrêmement fragilisée par la surpêche. La biomasse marine des espèces pélagiques a diminué de 90% parfois en 15 ans. La population de morue au Canada est passée en dessous de son seuil de renouvellement et n’arrive pas à se relever malgré l’interdiction totale de sa pêche. D’après l’indice du vivant proposé par le WWF, la baisse des populations marines suivies est exactement la même de celle des populations vertèbres terrestres (36%). Malgré la hausse des efforts de pêches (avancées technologiques ou augmentations des moyens déployés), les prises commencent à stagner voire à diminuer pour certaines espèces. Ces exemples montrent clairement que la santé de la biodiversité marine est autant en danger que celle terrestre. La stabilité observée concerne un seul paramètre de la biodiversité et non sa santé : Il fait clairement illusion.
  • Les effets d’emballement : Mr Boeuf rappelle pendant ses cours en ligne au college de France cette fois qu’un système change de lui-même dès qu’on perturbe plus de 50% de son milieu. La crise en biodiversité passerait ainsi d’une crise initiée par l’homme à une crise à dynamique propre. Ce chiffre des 50% est déjà atteint sur terre et peut expliquer à lui seul l’emballement de la crise écologique actuelle. La libération du méthane par le permafrost, la réduction de l’albedo et aussi la baisse de sequestration carbonique par les forêts actuelles sont autant de réactions négatives s’accumulant et accentuant la crise. Des exemples identiques existent en mer : La prolifération des méduses passant de proies à prédateurs par l’effet du nombre en est un. Ce retournement de la biodiversité ne ressort pas à travers le constat simpliste du comptage du nombre d’espèces disparues, indice ne révélant pas la tendance mais juste un instantané.
  • Les extinctions de masse peuvent passer de la terre à la mer. Pourquoi les ammonites ont disparu il y a 65 millions d’années et pas les nautiles bien que leurs morphologies se ressemblent? Parmi les réponses apportées par la science, l’une est que le nautile peut vivre en profondeur alors que la crise du crétacé-paléocène venait de terre (météorite ou volcanisme) pour affecter les océans à partir de sa surface. La crise actuelle est aussi d’origine terrestre (humaine) et là aussi, des indices commencent à montrer sa contamination en cours de l’océan. Mr Boeuf nous en donne 4 : Les températures de surface augmentent (et tel un couvercle thermique empêchent les échanges entre sous-surfaces et l’atmosphère) ainsi que la pollution, la surpêche et l’acidification. Notre crise va-t-elle ainsi prendre le chemin de celle du crétacé-paléocène pour s’étendre au milieu marin. Si il est difficile d’extrapoler catégoriquement et de prédire ce futur, il faut garder en tête que cette version-là est une possibilité et donc récuser la stabilité, meme observée actuellement, de la biodiversité marine.

Conclusion : S’il est vrai que le nombre d’espèces marines disparues est en effet moindre, l’énorme chute du nombre d’individus marins, sa fragilité enregistrée pendant les grandes crises précédentes et les indices de contagion observées rejettent toute interpretation positive et excessive de ce type d’observation. Il me semble ainsi plus correct de dire que l’observation moindre constatée dans l’érosion de la biodiversité marine provient en fait du mode d’observation bien plus que d’une stabilité inhérente aux écosystèmes eux-mêmes.

 

LES NOTES ET LES MOTS DE NOS PAIRS APPRENANTS

 

Screen Shot 2015-05-23 at 08.15.30